Mardi 23 Avril, le CESE (Conseil économique, social et environnemental) a rendu son avis sur la gestion et l'usage de l'eau en agriculture: la question n'est pas d'établir de quelconques responsabilités quant aux problèmes constatés, mais de rechercher des solutions efficaces pour relever les défis actuels et à venir, en tenant compte du contexte économique difficile dans lequel évolue la profession agricole. Les organisations membres du groupe environnement et nature, dont la LPO, gardent la conviction que la nécessaire transition vers un système agricole plus respectueux des humains et des milieux naturels ne se fera qu'à la condition d'une élaboration et implication collectives.

bocageCet avis du CESE, porté par Florence Denier Pasquier (FNE, France Nature Environnement), membre du groupe environnement et nature et éclairé par une quinzaine d'auditions, traite donc des relations eau et agriculture dans le strict cadre de l'activité agricole, essentiellement à l'échelle de la France métropolitaine.

Pour le CESE, la question n'est pas d'établir de quelconques responsabilités quant aux problèmes constatés, mais de rechercher des solutions efficaces pour relever les défis actuels et à venir, en tenant compte du contexte économique difficile dans lequel évolue la profession agricole. Les préconisations formulées témoignent de la conviction qu'il n'y a pas d'opposition fondamentale entre le développement indispensable d'une agriculture plus diversifiée, le maintien de la qualité de l'eau et la préservation des milieux aquatiques. L'avis identifie des chemins de convergence possible, reposant notamment sur des améliorations dans les pratiques agricoles et le développement de productions d'intérêt agro-écologique, dans le respect de la durabilité économique des exploitations.

Cet avis, qui prend en compte les efforts et innovations positifs déjà réalisés par le monde agricole, s'est donc voulu le plus réaliste possible. Il porte des propositions pour concrétiser la nécessaire phase de transition à laquelle les agriculteurs vont devoir s'adapter. Ainsi, face aux objectifs poursuivis et au résultat des votes : 103 Pour, 46 Abstentions, 21 Contre, les organisations membres du groupe environnement tiennent à faire part de leur vive incompréhension.
En effet, que signifie un vote défavorable des groupes agriculture et coopération? Peut-on nier la nécessaire évolution des pratiques agricoles, la volonté de la société civile de faire des propositions au regard de la menace sur la ressource en eau, les milieux aquatiques, la qualité de l'eau? Pourra-t-on face aux enjeux tout en maintenant des oppositions de principe qui empêchent de progresser ensemble ? Ou y a t-il une déconnexion si profonde entre une certaine partie du monde productif agricole et les citoyens ou les consommateurs ?
Enfin, comment interpréter l'abstention de certains groupes alors même que cet avis prône une agriculture respectueuse de l'équilibre des écosystèmes pour pouvoir s'inscrire dans la durée et demeurer ainsi productive à long terme ?
Les organisations membres du groupe environnement et nature gardent la conviction que la nécessaire transition vers un système agricole plus respectueux des humains et des milieux naturels ne se fera qu'à la condition d'une élaboration et implication collectives.

Les membres du groupe environnement et nature

groupe environnement et nature

Contact : Julie CUNAT- Attachée du Groupe Environnement et Nature
               julie.cunat@lecese.fr – fixe : 01 44 43 64 22- portable : 06 72 30 82 88

 

ANNEXE – déclaration commune au groupe environnement et nature, au groupe associations, et au groupe des organisations étudiantes et mouvement de jeunesse

La terre ne se cultive pas sans eau, l'eau ne se gère pas sans la terre, c'est ainsi que commence cet avis sur la gestion et l'usage de l'eau en agriculture. Eau et agriculture sont liées par des enjeux majeurs de société aussi larges que la santé publique via la qualité des eaux, la préservation des milieux aquatiques, l'autosuffisance alimentaire ou encore la pérennisation d'un lien soutenable entre eau et terres pour une production de long terme.
Personne n'ignore l'évidence : l'humanité ne saurait vivre sans production agricole. Personne n'ignore les difficultés économiques que connaissent nombre d'agriculteurs, et tout particulièrement les éleveurs. La répartition des aides de la PAC, la répartition des marges entre producteurs, transformateurs et distributeurs, la pression sur le foncier agricole, sont quelques uns des vrais problèmes qui se posent aujourd'hui. Mais personne n'ignore non plus qu'il est plus que temps de s'orienter résolument vers une agriculture qui réconcilie les productions et les équilibres environnementaux.

Conjuguer les intérêts économiques immédiats avec les objectifs d'une gestion globale à moyen et long terme de l'eau au plus près des territoires, en s'appuyant sur une plus grande solidarité, voilà ce à quoi il faut s'atteler. Par diverses illustrations, cet avis a montré que c'est possible : de bonnes pratiques existent déjà. Elles doivent être portées à connaissance, valorisées et mutualisées. L'avis souligne à juste titre qu'elles témoignent de la possibilité d'un changement de modèle intégrant la viabilité économique, la préservation des milieux et de la ressource en eau, ainsi que les aspects sanitaires. Nous croyons à cette évolution, car elle donne prise à une réappropriation de la question agricole par les citoyens, les consommateurs, comme les élus, et de fait, crée les conditions de leur implication.

Nous partageons donc la conviction de cet avis: il n'y a pas d'opposition irrémédiable entre une gestion multifonctionnelle de l'eau et la production agricole, mais des convergences possibles. Nous soutenons et nous revendiquons particulièrement 4 des axes que propose cet avis:

  • Le premier : priorité absolue à la santé publique en se focalisant sur une eau potable de qualité. C'est un défi collectif de long terme qui mérite un encouragement financier auprès des acteurs qui s'engagent à le relever, en favorisant notamment l'agriculture biologique.
  • Le deuxième : le constat que nos milieux aquatiques sont atteints par des pollutions diffuses massives. Les leviers pour les réduire sont identifiés et comme le pointe l'avis, déjà actionnés par certains. Il s'agit de passer à la vitesse supérieure, nous n'avons simplement pas le loisir d'attendre. Le groupe environnement et nature aurait voulu que soit préconisée une position radicale sur les intrants en raison de la dangerosité reconnue sur la biodiversité et la santé publique. Nos trois groupes se rangent cependant derrière la proposition de la section, plus progressive, qui fait de la redevance sur les intrants de synthèse un de ces leviers. Ce point a fait dissensus. Il nous semble pourtant, que nous pourrions tous tomber d'accord sur la nécessité que les plus vertueux doivent être encouragés, et ce via un outil financier permettant de conforter et d'amplifier les programmes agricoles, déjà aidés par les agences de l'eau.
  • Le troisième : nous constatons que l'avis ne prône pas une irrigation 0 mais une irrigation stratégique. Oui, nous considérons que les alternatives dont l'optimisation des ressources disponibles existent et doivent être pratiquées en priorité, avant d'envisager une mobilisation supplémentaire de la ressource en eau. Oui, nous soutenons une meilleure répartition de l'eau d'irrigation disponible. Et oui, nous affirmons que la création de nouvelles retenues de substitution doivent être encadrées juridiquement de sorte à permettre un équilibre global et sur le long terme entre les besoins des différentes catégories d'usagers de la ressource, particuliers, industriels, agriculteurs tout en préservant les écosystèmes aquatiques qui ne doivent pas être continuellement la variable d'ajustement.
  • Le quatrième : Il ne s'agit pas d'être catastrophiste mais juste réaliste. Les études convergent sur l'ampleur des conséquences attendues du changement climatique sur les ressources en eau, à savoir une diminution de celle-ci, de façon forte et rapprochée. Tous les usages doivent s'adapter en même temps, c'est une question de solidarité de société et une question de responsabilité par rapport aux générations futures et plus directement, envers la nouvelle génération d'agriculteurs qui va devoir pratiquer différemment.

Nous voudrions terminer en posant une question : est-ce que vouloir, de manière collective, se donner les moyens d'une nécessaire transition vers des pratiques moins polluantes, plus respectueuses de la santé publique et des milieux naturels, revient à une stigmatisation ? La réponse est non, et nos trois groupes l'affirment. Il ne s'agit pas de diviser mais de rassembler autour d'un enjeu commun qui n'est pas seulement comment produire aujourd'hui, mais aussi comment produire demain. Merci à la rapporteure d'avoir mis toute son énergie à tenter de concilier les ressentis et points de vue divergents, tout en gardant une ambition, que nous jugeons à l'honneur de cette assemblée.

Le groupe des associations, le groupe environnement et nature et le groupe des organisations étudiantes et mouvement de jeunesse on voté cet avis.

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