Ceux qui tentent de justifier l’injustifiable, à savoir l’agression caractérisée de responsables de la LPO, mettent en avant le droit de propriété.
Hier, le Président de l’association de défense des chasses traditionnelles sur France Inter, et encore aujourd’hui le Sénateur Carrère dans le journal Sud-Ouest. L’argument est en gros le suivant : « c’est vrai que ce n’est pas bien de donner des coups de pelle mais que feriez-vous si quelqu’un venait chez vous. Moi je ne sais pas comment je réagirais ».
Sauf que, à aucun moment les responsables de la LPO n’ont violé de domicile privé au sens juridique du terme. À aucun moment, ils n’ont passé une barrière, ni passé outre un panneau d’interdiction. Ils se sont rendus dans un champ libre d’accès, entre deux maisons éloignées d’une centaine de mètres et chacune bien close par un grillage.
L’article 226-4 du code pénal prévoit bien que « L’introduction dans le domicile d’autrui à l’aide de manœuvres, menaces, voies de fait ou contrainte, hors les cas où la loi le permet, est puni d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende. Le maintien dans le domicile d’autrui à la suite de l’introduction mentionnée au premier alinéa, hors les cas où la loi le permet, est puni des mêmes peines ». Mais la jurisprudence est venu préciser les choses.
La notion de domicile a été encadrée : elle peut comprendre des lieux où il ne soit pas possible de vivre, les dépendances d’un local d’habitation. Il en est ainsi, en particulier, d’un débarras, d’une buanderie, d’un poulailler. Elle s’étend aussi à la cour ou au jardin d’une habitation. Elle n’est cependant pas extensible indéfiniment. Le domicile est « la dépendance étroite et immédiate de la demeure d’un citoyen ». Dans un arrêt du 11 mars 2005, la Cour d’appel d’Aix a jugé que ne commet pas une violation de domicile celui qui pénètre sur la propriété d’autrui lorsque cette propriété consiste en des parcelles de terre en nature plantées d’arbres. Au cas présent, le champ voisin de la propriété ne pourrait que difficilement être qualifié de « dépendance étroite et immédiate » de la demeure des braconniers.
Par ailleurs, l’infraction suppose la démonstration d’un « acte d’introduction ». Ainsi, l’infraction n’est pas constituée si l’auteur entre dans le domicile de la victime, en profitant du fait que le portail était resté ouvert ou entrouvert, ou lorsque la porte de la maison était fracturée et non verrouillée (Cour d’appel Montpellier, 3 juill. 2008 - Cour d’appel Poitiers, 13 juin 2008).
Au cas présent, en l’absence de clôtures, dans un champ ouvert, on perçoit mal quel pourrait être l’acte d’introduction.
L’infraction suppose que son auteur ait fait usage de procédés illégitimes. Il peut s’agir de manœuvres, de menaces (attitudes menaçantes, menaces verbales) ou de voies de fait. Là encore, le fait d’escalader une clôture pourrait constituer une voie de fait. Mais en l’absence de clôture ou de mur, pour un champ ouvert, la voie de fait ne serait pas caractérisée.
Sur ce motif une nouvelle fois l’infraction ne pourrait être caractérisée.
Le braconnage des oiseaux protégés est, comme la violation de propriété, passible de 15 000 € d’amendes. Et le braconnage était, lui, bien caractérisé, pas la violation de domicile. Sans quoi il faut prévenir les randonneurs et autres ramasseurs de champignons de sortir casqués !
Ensemble, mettons fin au massacre illégal des oiseaux familiers :