Après 27 mois d’un parcours parlementaire tumultueux, la loi biodiversité a enfin été adoptée par l’Assemblée nationale, l’occasion de revenir sur le travail de la LPO aux côtés des associations de protection de l’environnement qui ont largement contribué à maintenir et renforcer les mesures de protection de l’environnement du texte initial.

Abeille sauvage (Halictus scabiosae) – Crédit photo : Nicolas MacaireAbeille sauvage (Halictus scabiosae) – Crédit photo : Nicolas Macaire

Des attentes fortes

Le projet de loi cadre pour la biodiversité annoncé par François Hollande en 2012 était particulièrement attendu, pourtant celui-ci n’a étéenregistré à l’Assemblée nationale qu’en mars 2014. Il commence alors un long et tumultueux parcours parlementaire durant lequel de nombreuses ONG de protection de l’environnement se sont mobilisées.

Sous la pression des lobbies

Dès le début, la loi porte les stigmates du poids des lobbies. Celui de la chasse en particulier : alors que se dessine la création d’une grande Agence française pour la biodiversité regroupant tous les acteurs de la protection de l’environnement, le projet de loi n’intègre pas l’ONCFS. Cet établissement public est pourtant essentiel en matière de biodiversité terrestre, mais en grande partie financé grâce aux redevances cynégétiques…

S’il est de notoriété publique que le lobby de la chasse a ses entrées au Parlement où il est d’ailleurs surreprésenté et procède à une « pression » de proximité particulièrement efficace, d’autres intérêts privés ont également pesé: les professionnels de la pêche maritime qui ont brigué avec succès la possibilité de gérer des réserves naturelles, les agriculteurs et l’agrochimie …

La mobilisation des associations de protection de la nature

Tout au long de l’examen du projet de loi, la LPO a travaillé en lien avec FNE, Humanité et Biodiversité, la Fondation Nicolas Hulot et l’ANPCEN mais également avec d’autres ONG sur des sujet spécifiques tels que l’UNAF s’agissant de l’interdiction des néonicotinoïdes.

Un important travail de veille a été effectué à chaque étape de la navette parlementaire associant expertise des amendements, suivi des débats dans les deux chambres ainsi que dans leurs commissions. Des échanges réguliers ont eu lieu entre les associations de protection de la nature, les parlementaires et le Gouvernement

Les associations de protection de la nature ont rédigé conjointement des propositions d’amendements, même si certaines d’entre elles étaient soutenues plus particulièrement par l’une ou l’autre association. Ainsi, des amendements ont été principalement portés par la LPO :

  • Interdiction de la chasse à la glu, de la chasse des mammifères en période de dépendance, des battues administratives aux espèces protégées

La LPO a également mis à contribution ses sympathisants. À plusieurs reprises, nous vous avons demandé de soutenir et de relayer nos propositions auprès des parlementaires. Nous vous remercions pour votre implication.

Bilan à l’issue de l’adoption définitive du projet de loi par l’Assemblée nationale

Il faut bien l’avouer, les ONG ont de nombreux regrets qui les empêchent de parler de loi visionnaire. La LPO regrette que l’ONCFS n’intègre pas l’Agence française pour la biodiversité, que l’animal sauvage reste sans statut juridique, ou que la chasse à la glu et la chasse des mammifères en période de dépendance ne soient toujours pas interdites.

Au-delà des occasions manquées, une énergie considérable a été dépensée pour seulement maintenir les acquis et empêcher des régressions par rapport au projet initial ou au droit actuel.

Nos associations de protection de la nature saluent toutefois un certain nombre d’avancées, comme :

  • La reconnaissance du principe de non régression du droit de l’environnement et de solidarité écologique, l’objectif d’absence de perte nette de biodiversité ou encore l’obligation de réparation du préjudice écologique ;
  • La consolidation du triptyque « éviter, réduire, compenser » (ERC) qui consiste, dans le cadre de certaines procédures administratives d’autorisation, pour des projets d’aménagement soumis à étude d’impact environnemental par exemple, à prévoir des mesures d’évitement, de réduction, et/ou lorsque certains impacts ne peuvent être évités ou réduits, des mesures de compensation des impacts environnementaux que générera le projet ;
  • La création d’outils novateurs comme les obligations réelles environnementales ou les zones prioritaires pour la biodiversité ;
  • L’interdiction de l’utilisation des néonicotinoïdes en 2018 ou des battues aux espèces protégées.

Et maintenant ?

L’adoption définitive du projet de loi ne marque pas la fin du travail des associations. Son succès dépendra en grande partie des nombreux décrets qui devront être adoptés pour son application. Or, on ne sait que trop bien à quel point ces textes peuvent tarder à être publiés ou être dénaturés sous pression à nouveau des lobbies…