Douze ans après les faits, les responsables du déversement de pétrole brut dans le fleuve viennent d’être enfin condamnés à verser des indemnités en réparation du préjudice écologique.
Le 12 janvier 2007, suite à l’effondrement d’une cuve de stockage de la Société Pétrolière du Bec d’Ambès (SPBA), filiale de Total et d’Esso, des milliers de mètres cubes de pétrole brut s’étaient déversés dans les eaux de la Garonne.
Cet incident majeur eut lieu dans une zone classée Natura 2000, à proximité de la ville de Macau, et à l’entrée de l’estuaire de la Gironde, écosystème riche et complexe à l’interface entre deux fleuves (Garonne et Dordogne) et l’Océan Atlantique. C’est un site fondamental pour les poissons migrateurs et l'avifaune (118 espèces d’oiseaux protégés) qui abrite également plusieurs espèces végétales menacées d’extinction à l’échelle européenne.
Rappel historique
11 janvier 2007 : Fuite de la cuve à pétrole
Une fuite est détectée la veille de l’incident dans la cuve d’hydrocarbures, mais jugée insuffisante pour que le directeur général déclenche la procédure de vidange de la cuve.
12 janvier 2007 : Rupture de la cuve
La rupture de la cuve provoque le déversement du pétrole brut, formant une nappe de 5 mètres de large sur 1 kilomètre de long.
27 février 2007 : Fuite du bassin de décantation
Le bassin de décantation, également défectueux, est à l’origine d’un second déversement. Au total, ce sont 3000 mètres cubes de pétrole qui se sont répandues dans les eaux du fleuve. Près de 500 oiseaux ont été touchés par la pollution du site, dont la majorité n’a pas survécu.
2 décembre 2014 : La société et son directeur sont relaxés
A l’issue d’un premier procès au Tribunal correctionnel de Bordeaux, les parties civiles, à savoir la mairie de Macau, la LPO, la Société pour l’Etude et l’Aménagement de la Nature dans le Sud-Ouest (SEPANSO 33), l’ASPAS et France Nature Environnement, sont jugées irrecevables en raison de doutes sur les origines et les conséquences réelles de la pollution. Elles font appel de cette décision.
14 octobre 2016 : Les dommages et intérêts sont refusés
La Cour d’Appel de Bordeaux reconnaît cette fois les fautes d’imprudence de la société et de son directeur, et déclare recevables les parties civiles, mais refuse le versement d’indemnités en reconnaissance du préjudice écologique, motivant un pourvoi en cassation.
16 janvier 2018 : Annulation de la décision
La Cour de cassation invalide le jugement d’octobre 2016 et ordonne un retour devant la cour d’appel de Bordeaux « autrement composée ».
6 juin 2019 : Nouveau procès en appel
La cour d’appel de Bordeaux se réunit et met son arrêté en délibéré jusque fin septembre.
26 septembre 2019 : Dernier verdict
Douze ans après les faits, la SPBA et son ancien directeur général sont condamnés à verser une indemnité s’élevant à près de 150 000 € aux parties civiles. La LPO obtient 29 400 €, soit 70 € pour chacun des 420 oiseaux tués par les hydrocarbures, plutôt satisfaite de cette nouvelle reconnaissance du préjudice écologique, principe juridique né suite à la marée noire causée par le naufrage de l’Erika il y a tout juste 20 ans. A noter que la mairie de Macau, qui avait demandé plus de 3,5 millions de dommages et intérêts, soit 1000 € par habitant, reçoit 24 000 € et s’estime légitimement très déçue. Elle n’exclue pas un nouveau pourvoi en cassation...