Jeudi 18 décembre 2019, Chantal Jouanno, Présidente de la Commission Nationale du Débat Public (CNDP), a remis l’expertise réalisée par Mélanie Goffi à Allain Bougrain Dubourg, Président de la LPO, sur les conditions de mise en œuvre, déroulement et prise en compte des consultations publiques sur les projets de textes règlementaires par le Ministère en charge de l’écologie.

cndp courliscendre fabricecahez 650Courlis cendré (Numenius arquata) - Crédit photo : Fabrice Cahez

La CNDP a observé pendant un an un panel de consultations publiques nationales et locales. La LPO retient de son rapport la subjectivité des textes de présentation, l’absence de références techniques et scientifiques, les dysfonctionnements durant la consultation, l’absence de prise en compte du résultat des consultations, etc. Ce que pressentait la LPO est mis formellement en évidence par la CNDP qui, in fine, apporte un certain nombre de recommandations à l’Etat pour que les principes mêmes de la consultation soient enfin respectés.

Alertée par de nombreux adhérents et sympathisants lassés de l’absence de prise en compte de leurs contributions, et constatant un nombre important de problèmes, la LPO a saisi la CNDP fin 2018 afin que soient étudiées les conditions de déroulement des consultations publiques initiées par le Ministère de la transition écologique et solidaire. A ce titre la LPO se réjouit qu’un pays comme la France permette à une ONG de saisir une Commission Nationale indépendante pour évaluer l’action de l’Etat.

Après avoir rappelé les principes qui régissent et encadrent la participation du public dans le domaine environnemental, et après avoir présenté la méthode retenue, la CNDP s’attache à analyser plus spécialement une vingtaine de consultations d’où il ressort :

Concernant la phase d’information :

  • L’accès aux consultations est compliqué et les dénominations peu explicites ;
  • Les règles et principes régissant les consultations ne sont pas connus ni accessibles ;
  • Très peu de consultations présentent les enjeux, aucune étude n’est référencée, les avis des commissions spécialisées sont au mieux non accessibles, au pire passés sous silence ;
  • Les résultats des précédentes consultations sur les mêmes sujets, et effets des textes pris, ne sont pas rappelés(1) ;
  • On ne sait pas qui sont les auteurs des textes ;
  • Le choix des dates n’est pas explicité (la LPO note la fréquence des périodes de congés, et le fait que les textes sont souvent pris très peu de temps après la clôture des consultations) ;
  • Les critères de modération sont absents. On apprend grâce au travail de la CNPN que, au-dessus de 10.000 contributions, un principe d’échantillonnage est appliqué (30% des messages par tranche de 1000, les autres n’étant pas lus) ;
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    Concernant la phase d’analyse des contributions, la CNDP révèle « le même manque de transparence » :

  • Les questions cynégétiques sont analysées par le bureau de la chasse, ce qui constitue une entorse majeure à l’une des règles de base de la concertation pour garantir la neutralité et l’impartialité, soulignée par la CNDP ;
  • Plus les commentaires sont longs, plus ils ont de chances d’être classés « hors sujet » ;
  • Des jugements de valeurs inappropriés sont portés sur certains commentaires ;
  • La majorité des consultations analysées ne tient pas compte de la majorité des votes exprimés ;
  • L’avis des instances consultatives sert parfois à justifier la non prise en compte des avis(2) ;
  • La majorité des décisions ne font aucun lien avec les résultats des contributions !
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    Pour Allain Bougrain Dubourg « Les consultations publiques ne sont pas des exercices obligés, exemptés de toute exigence de rigueur et de transparence dans leur prise en compte par les autorités. C’est pourtant bien ce qu’il apparait à la lecture du rapport de la CNDP. La LPO demande que des améliorations soient apportées sans attendre aux modalités de consultations publiques. Mais elle continuera à mobiliser ses adhérents et sympathisants afin de combattre les décisions politiques « contre Nature » ».

     

    (1) Ce qui conduit l’Etat à représenter année après année les mêmes projets de textes, sans tenir compte des avis défavorables très largement majoritaires et même trop souvent des textes pourtant déjà annulés pas les plus hautes instances juridiques. Par ailleurs, la LPO a relevé des présentations mensongères comme le fait d’affirmer qu’il faut chasser les oies en février parce qu’elles causeraient des dégâts aux Pays-Bas (alors que le Ministre dispose d’un rapport de l’ONCFS témoignant du % insignifiant d’oies migratrices concernées), ou lorsque, plus récemment, la Ministre affirme qu’on peut chasser 6000 courlis cendrés parce que les scientifiques n’auraient pas pu apporter les éléments alors qu’ils ont préconisé un moratoire) ;

    (2) Enfin, la LPO a constaté des consultations où le Ministère ne retient que quelques rares avis minoritaires en faveur d’un projet d’arrêté sur la chasse, pour justifier sa modification : pour le courlis cendré par exemple, il justifie l’obligation de ne fournir qu’une seule aile au lieu de deux comme prévu dans le texte soumis à consultation.