L’écologiste tunisienne, basée à la LPO, a été distinguée par le Fonds de partenariat pour les écosystèmes critiques (CEPF) pour l’ensemble de sa contribution envers la conservation de la biodiversité en Méditerranée.
Le Fonds de partenariat pour les écosystèmes critiques (CEPF) a nommé Awatef Abiadh ainsi que neuf autres écologistes du monde entier "Hotspot Heroes" pour leurs efforts de protection au sein des hauts lieux de la biodiversité mondiale. Les lauréats ont été choisis parmi les centaines d'organisations de la société civile qui ont reçu des subventions du CEPF dans les dix hotspots mondiaux de la biodiversité où le fonds est actuellement actif. Le CEPF reconnaît ces héros dans le cadre de la célébration de son 20e anniversaire.
Basée à la LPO, Awatef Abiadh fait partie de l’équipe régionale de mise en œuvre pour le Bassin Méditerranéen et soutient à ce titre les projets financés en Afrique du Nord. Dans le cadre de ses missions, elle a ainsi travaillé avec plus de 50 bénéficiaires du CEPF au Maroc, en Tunisie, en Algérie, en Libye et au Cap vert. Elle sert également de point focal sur les questions de genre au sein du CEPF pour la région, aidant notamment les bénéficiaires à mieux prendre en compte la notion de genre dans leurs projets. Elle est un modèle pour les femmes qui agissent pour la conservation dans les pays méditerranéens.
En Libye, où la protection de la nature est naissante et peu reconnue, Awatef a joué un rôle déterminant en aidant les bénéficiaires du CEPF à recevoir des fonds et à adapter leurs projets lorsque des risques survenaient en termes de sécurité. Elle a également animé des cours universitaires et organisé des sessions de formation pour ces organisations.
« Awatef a contribué à favoriser la création d’un groupe de bénéficiaires incroyablement enthousiastes, travaillant étroitement les uns avec les autres. C’est une véritable figure emblématique dans ces pays », a déclaré Liz Smith, chef de l'équipe régionale de mise en œuvre du CEPF.
Awatef a grandi dans la campagne tunisienne et a tissé très tôt un lien avec la nature. Elle a commencé sa carrière comme enseignante, d'abord dans les écoles puis à l'Université de Tunis où elle a créé un club environnemental.
Grâce à une expérience de bénévolat sur la gestion des espèces envahissantes sur Zembretta, elle s’est passionnée pour les processus de restauration des écosystèmes par la mise en place d’actions concrètes. Elle a changé d'orientation professionnelle pour se diriger vers la conservation et, en 2012, a brillamment obtenu son doctorat en biologie à l'Université de Tunis. Elle a depuis publié de nombreux articles scientifiques sur l'écologie et l'évolution.
« Awatef a mis énormément d'énergie dans le hotspot et a contribué au succès du CEPF dans cette partie du monde au cours des sept dernières années. Personne dans la région ne s'opposerait à ce qu'elle soit dénommée comme une héroïne », a déclaré Pierre Carret, directeur des subventions du CEPF.
Interview
Pourriez-vous décrire brièvement votre rôle au sein du CEPF ?
Awatef : « Je fais partie de l’équipe régionale de mise en œuvre (RIT) pour le Bassin Méditerranéen. Notre rôle est de superviser l'investissement du CEPF, pour nous assurer que les financements sont donnés à des projets qui travaillent sur les sites et les espèces appropriées. Nous renforçons également les compétences des organisations de la société civile que nous finançons, afin qu'elles puissent gérer au mieux leurs subventions et leurs projets et devenir meilleures lorsqu’elles mettront en place de nouvelles actions de conservation. »
Quels ont été les principaux résultats atteints jusqu’à présent ?
Awatef : « La région s'est progressivement renforcée, et les bénéficiaires que nous soutenons ont réalisés de nombreux exploits en termes de conservation, tels que la mise en place de nouvelles aires protégées en Algérie, la cogestion d'une aire marine protégée en Tunisie et le renforcement des coopératives au Maroc.
Grâce à l’équipe régionale, nous avons facilité de nouveaux partenariats entre les organisations, nous avons renforcé les réseaux en introduisant de nouvelles structures, nous avons créé des synergies avec d'autres donateurs dans la région et nous avons donné des opportunités à la société civile dans des pays où d'autres donateurs ne pouvaient pas aller, comme en Libye par exemple. »
Quelle est la leçon la plus importante que vous tirez de votre travail avec le CEPF ?
Awatef : « Au cours de ces 7 années, nous avons beaucoup appris sur la mise en œuvre de projets dans le Bassin Méditerranéen en général et en particulier en Afrique du Nord. L'une des choses que je retiens c’est que même avec peu de financement, les petites organisations locales peuvent avoir un impact considérable si elles impliquent les populations locales. »
Travailler dans le domaine de la conservation est difficile et s'accompagne souvent d’échecs. Qu'est-ce qui vous motive ?
Awatef : « Rien n'est difficile avec la persévérance. Il y a des difficultés, bien sûr, en particulier lorsque nous travaillons avec différents niveaux de parties prenantes traitant de différents domaines d'intérêt. Notre objectif principal est de leur permettre de devenir autonome afin de conserver la biodiversité de manière optimale.
Ce sont les réussites en matière de conservation dans la région qui nous gardent sans cesse motivés, mes collègues et moi. Nous sommes impliqués avec nos bénéficiaires lorsque nous approuvons leurs actions, partageons leurs défis, leurs victoires mais aussi leurs échecs. »
Quels conseils donneriez-vous aux futurs écologistes ?
Awatef : « Si j'ai des conseils à donner aux écologistes, ce serait de croire que le changement est possible et qu'il n'est pas trop tard. Nous avons encore une chance de préserver les ressources naturelles si nous utilisons les outils appropriés et si nous travaillons ensemble. »
Plus d'informations
En savoir plus sur les autres Héros des Hotspot
Le Fonds de Partenariats Pour les Ecosystèmes Critiques (CEPF) est une initiative conjointe de l'Agence Française de Développement, Conservation International, l’Union Européenne, le Fonds pour l'Environnement Mondial, le Gouvernement du Japon et la Banque mondiale. L’objectif fondamental est de s'assurer que la société civile est engagée dans la conservation de la biodiversité.
Le CEPF est plus qu'un simple bailleur de fonds
Une équipe régionale de mise en œuvre dédiée qui oriente le financement vers les domaines les plus importants et même vers les plus petites organisations. Elle renforce les capacités de la société civile, améliore les résultats en matière de conservation, renforce les réseaux et partage les meilleures pratiques. Dans le hotspot de biodiversité du Bassin Méditerranéen, ce rôle est confié à BirdLife International et plusieurs de ses partenaires : LPO (BirdLife France), DOPPS (BirdLife Slovénie) et BPSSS (BirdLife Serbie).
En savoir plus sur www.birdlife.org/cepf-med