Le gouvernement renouvelle pour un an la suspension de la chasse au Courlis cendré et à la Barge à queue noire, deux espèces en déclin. Encourageant, mais encore insuffisant.
Dans 2 arrêtés publiés le 28 juillet au Journal Officiel, la Ministre de la transition écologique a suspendu pour une nouvelle saison de chasse, soit jusqu'au 30 juillet 2022, la chasse à la Barge à queue noire et au Courlis cendré sur tout le territoire métropolitain.
La LPO milite depuis de nombreuses années pour une stricte protection de ces deux espèces menacées, inscrites sur la liste rouge de l'Union internationale de conservation de la nature (UICN).
Le Courlis cendré (Numenius arquata) est un limicole très sensible à la chasse (espèce longévive à maturité sexuelle tardive et faible fécondité). En raison du déclin prononcé de sa population (-43% depuis 1980 en Europe, -68% depuis 2001 en France), le plan d’action international pour la conservation de sa population européenne demande à la France depuis 2015 de mettre en place une gestion adaptative des prélèvements de cette espèce menacée. A défaut, il recommande à la France d’appliquer un moratoire total sur la chasse du Courlis cendré. Le comité d'experts sur la gestion adaptative crée en 2019, dans son avis, préconise également un arrêt de la chasse de cette espèce menacée d’autant que qu’il n’y aucune donnée qui permette d’apprécier l’origine et l’âge des individus prélevés, ainsi que sur les tableaux de prélèvements annuels du courlis (obligatoires pour tous les limicoles chassés sur le domaine public maritime). En juillet 2019, le ministère a autorisé un quota de chasse de 6000 courlis que la LPO a aussitôt contesté avec succès devant le Conseil d’Etat. L’arrêté fut suspendu le 26/08/19 avant d’être annulé le 17/12/2020, confirmant que le quota devait être de zéro individu chassé. Depuis, le Ministère a pris un moratoire suspendant la chasse du courlis cendré pour la saison 2020-2021 qu’il vient donc de reconduire en 2021-2022.
En raison du déclin prononcé de la sous-espèce continentale de Barge à queue noire (Limosa limosa limosa), l’ensemble des pays de la voie de migration se sont engagés dans le plan international d’action de l'AEWA, reconduit en décembre 2018 pour une période de 10 ans (soit jusqu’en 2028), à ne plus ni chasser la sous-espèce continentale, ni la sous-espèce islandaise (L. l.islandica). Le Comité d’experts, dans son avis de mai 2019, donnait une possibilité aux chasseurs de prélever 300 individus de la sous-espèce islandaise en limitant la période d’ouverture de la chasse de novembre à décembre pour minimiser le risque de prélever des individus de la sous-espèce continentale. Le ministère, selon ses obligations internationales, a préféré renouveler d’un an le moratoire sur la chasse de l’espèce afin d'avoir le temps de renégocier son engagement à l’international.
Ceci n’est toutefois pas suffisant
Les dernières saisons de reproduction de la Barge à queue noire en Islande ne sont pas rassurantes car les pressions et menaces que connaissent les limicoles prairiaux en Europe commencent à sévir également sur cette île. Au vu du plan d’action AEWA qui interdit sa chasse de 2018 à 2028, c’est donc à minima un moratoire de 3 ans (et non 1 an) qu’il aurait fallu instaurer pour ne pas nuire à la conservation de cette espèce.
Même chose pour le Courlis cendré: la France était le dernier pays d’Europe a encore chasser cette espèce. Les efforts des pays européens d’où sont originaires une partie de nos hivernants (Royaume-Uni, Allemagne, Pays-Bas, Scandinavie et Pologne) pour tenter de redresser le succès reproducteur de leurs populations, altéré par la destruction/dégradation de leurs habitats, ne sauraient être piétinés plus longtemps !