En mars 2016, la Cour de Cassation récompensait la ténacité de la LPO en entérinant la reconnaissance du préjudice écologique au profit de la LPO suite à la pollution (fuite d’hydrocarbures) de l’estuaire de la Loire en mars 2008 à la raffinerie TOTAL de Donges (Loire-Atlantique). Elle renvoyait à nouveau devant la cour d‘appel de Rennes.

Lavage d'un Fou de Bassan (Morus bassanus) - Crédit photo : Gilles BentzLavage d'un Fou de Bassan (Morus bassanus) - Crédit photo : Gilles Bentz

C’est cette audience devant la Cour d’Appel de Rennes, autrement composée, qui est attendue aujourd'hui vendredi 14 octobre 2016.

Non seulement les juges de la haute juridiction avaient accueilli le pourvoi formé par la LPO mais ils ont aussi cassé l’arrêt de la cour d’appel de Rennes du 27 septembre 2013 qui avait débouté la LPO de ses demandes en indemnisation du préjudice écologique.

Rappel des faits

Par jugement d’octobre 2011, le Tribunal correctionnel de St-Nazaire avait condamné TOTAL pour faits de pollution à une amende de 300 000€ et à verser près de 500 000€ d’indemnités aux parties civiles. La LPO avait obtenu 38 000€ de préjudice matériel et moral. Le tribunal correctionnel avait en revanche exclu toute reconnaissance du préjudice écologique au profit de la LPO et écarté la jurisprudence de l’Erika (arrêt Cour d’Appel de Paris du 30/03/2010).

La LPO avait alors relevé appel. Le 27 septembre 2013, la Cour d‘Appel de Rennes avait rendu une décision plutôt ambiguë : Si elle reconnaissait le préjudice écologique de la LPO, elle en refusait toutefois l’indemnisation.

Pollution Donges - Crédit photo : LPO Loire-AtlantiquePollution Donges - Crédit photo : LPO Loire-AtlantiqueEn cassant cet arrêt, le 22 mars 2016, la Cour de Cassation avait rappelé que le préjudice écologique consistait en une atteinte directe ou indirecte portée à l’environnement et découlant de l’infraction. Elle avait décidé que même si TOTAL avait dépollué les habitats naturels affectés, la perte de nombreux oiseaux* et l’altération notable de leurs habitats pendant deux ans, causait un préjudice écologique dont la LPO pouvait prétendre à réparation. Le fait que ce préjudice n’ait pas pu être évalué avec précision par la LPO n’aurait pas dû conduire la Cour d’Appel à en refuser l’indemnisation de l’association alors qu’elle en avait reconnu l’existence. Selon la Haute juridiction, il incombait à cette dernière de chiffrer le préjudice « en recourant, si nécessaire, à une expertise ».

4 ans après l’arrêt ERIKA, et quelques mois après l’adoption de la LOI du 8 août 2016 pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages (1) dont l’article 4 consacre aux articles 1386-19 et suivants du code civil, la reconnaissance du préjudice écologique, la décision attendue ce 14 octobre devant la Cour d’Appel de Rennes, est importante pour la LPO et les acteurs de la protection de l’environnement et la nature.

La LPO sollicite réparation financière du préjudice écologique tandis que la société Total minimise l’impact environnemental et prétend que la pollution de la raffinerie de Donges ne présentait pas un niveau de gravité suffisant (dommages réversibles dans un délai raisonnable) et qu’elle a déjà fait l’objet de réparation en nature (dépollution, récupération des déchets…) qui rendrait superflu le besoin d’y ajouter une réparation financière complémentaire/subsidiaire au profit de la LPO. De son côté, la LPO soutient que la dégradation du site « pollué » pendant 2 ans qui n’a pas permis à un certain nombre d’oiseaux de venir s’y nourrir ni d’y nicher et le nombre d’oiseaux mazoutés morts qui ne sont qu’une estimation puisque Total a refusé de permettre l’accès au site pollué permettant de comptabiliser les victimes, constitue une atteinte « grave » même si réversible et dont la réparation en nature par Total est insuffisante à couvrir le préjudice écologique.

* Pour mémoire, 300 cadavres furent répertoriés par la LPO correspondant à un nombre extrapolé d’oiseaux mazoutés victimes puisque les bénévoles n’avaient eu accès aux rives de la Loire polluées interdites d’accès par TOTAL.

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