Après la catastrophe de l'Erika, assisterons-nous à une catastrophe juridique ?

400Nettoyage plage photo A-Marie Prunevielle LPONettoyage plage photo A-Marie Prunevielle LPODernière minute : Communiqué de presse de la cour de cassation. Arrêt n° 3439 du 25 septembre 2012

Dans l'affaire de la marée noire de l'Erika et suite à la dernière audience du 24 mai 2012, la Cour de Cassation avait  annoncé qu'elle rendrait sa décision le 25 septembre 2012. L'ultime jugement advient donc près de 13 ans après cette catastrophe pétrolière survenue le 12 décembre 1999 et qui souillait près de 400 km de côtes françaises, de la pointe du Finistère à la Charente-Maritime, déversant 20 000 tonnes de pétrole et affectant plus de 150 000 oiseaux.

Le 30 mars 2010, l'affréteur du bateau Total, la société de classification Rina, l'armateur Giuseppe Savarese et le gestionnaire Antonio Pollara avaient été condamnés pénalement pour pollution en appel. Tous s'étaient pourvus en cassation. Les parties civiles avaient obtenu 200,6 millions d'euros d'indemnités, dont environ 13 millions au titre de leur préjudice écologique.

La chambre criminelle de la Cour de cassation doit ainsi se prononcer sur la régularité juridique de l'arrêt rendu en 2010 par la cour d'appel de Paris, et non sur le fond de l'affaire.

La LPO a de nombreuses et graves raisons d'être inquiète de l'issue de cette procédure, compte-tenu des conclusions de l'avocat général Didier Boccon-Gibod qui conclut à la cassation totale sans renvoi de l'arrêt de la Cour d'Appel de Paris du 30 mars 2010, c'est-à-dire l'annulation définitive de la procédure !!

Total déjà blanchie au niveau de sa responsabilité civile par la Cour d'Appel,  se verrait alors exonérée de sa responsabilité pénale puisque cette pollution aussi grave eut-elle été, ne serait pas juridiquement réprimée !!!!

Faisant fi de considérations morales ou d'équité, celui-ci a estimé que la justice française n'a pas compétence pour juger du naufrage de ce navire maltais qui a coulé en dehors des eaux territoriales, dans la zone économique exclusive(ZEE) mais que seules les conventions internationales s'appliquent.

Bien sûr Total a rassuré les parties civiles en rappelant que les indemnisations qu'il a versées aux parties civiles à l'issue du premier procès en 2008 étaient "définitives".

Dans le même sens, il a appelé à rejeter la notion de préjudice écologique, tant au profit des associations qu'au bénéfice des collectivités territoriales.

Il s'agirait là d'un recul considérable en matière de droit de l'environnement puisque ce préjudice avait été retenu par le tribunal correctionnel et confirmé par la Cour d'appel de Paris !

La LPO fortement investie et mobilisée avec ses milliers de bénévoles, ses associations locales et ses centres de soin dans la « gestion » de cette marée noire reste. Allain Bougrain Dubourg, son Président déclare : « Il serait inacceptable que la marée noire soit blanchie. Cela signifierait qu'au nom du vide juridique, cette décision pourrait face « tache d'huile » au profit des multinationales du transport maritime qui verraient là une occasion d'assouplir leur responsabilité élémentaire ».

La LPO en appelle au bon sens afin que l'ultime décision, dans cet interminable dossier, ne devienne pas un encouragement à polluer.

Elle juge en outre que cette décision contagieuse aura tôt fait de faire « tache d'huile » au profit des multinationales du transport maritime qui verront là un atout/clause extraordinaire d'irresponsabilité et un encouragement aux pollueurs des mers.

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Patrick LADIESSE
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