La LPO publie le bilan du comptage national 2018 des oiseaux d’eau et rappelle à cette occasion que ces espèces sont des sentinelles des changements globaux en cours. Leur diminution doit nous alerter sur l’état de santé des milieux humides, mais plus généralement sur celui de notre planète.
Chaque année en janvier, plus de 150 000 ornithologues comptent les oiseaux d’eau – cygnes, oies, canards, grands et petits échassiers, mouettes et goélands, grues, flamants et grèbes et plongeons – dans le monde entier afin d’estimer leurs effectifs et en savoir davantage sur leur état de santé. En France, où l’on pratique ces comptages depuis 1967, ce travail est coordonné par la LPO. Plusieurs milliers d’observations ont pu être collectées en 2018 puis analysées grâce à plus de 1 500 « compteurs » sur environ 500 zones humides côtières et continentales.
Eider à duvet (Somateria mollissima) - Crédit photo : Emile Barbelette
Des résultats fluctuants
Au cours des 10 dernières années, 17 espèces d’oiseaux d’eau sont en augmentation sur le territoire national, 17 sont stables, 18 fluctuantes et 18 en diminution. Celles dont les effectifs déclinent le plus sont le Grèbe jougris, le Fuligule milouinan, l’Eider à duvet, la Macreuse brune et le Grèbe à cou noir.
La France présente sur le long terme une tendance à l’augmentation du nombre d’oiseaux d’eau dénombrés à la mi-janvier, plus forte que celle observée à l’échelle mondiale. Ce bon résultat dépend sans doute de l’existence d’espaces protégés, dont un important réseau de Réserves Naturelles sur le littoral atlantique et les marais de l’Ouest, mais aussi de la protection de certaines espèces d’oiseaux.
En hiver, les oiseaux d’eau qui ont niché pour beaucoup dans les zones arctiques et boréales, viennent passer la mauvaise saison dans des régions tempérées ou tropicales. Ces rassemblements permettent de les dénombrer plus facilement que lorsqu’ils sont dispersés dans la toundra ou dans des zones difficiles d’accès. Cela a permis, au fil des décennies, de caractériser des zones humides d’importance nationale et internationale qui bénéficient souvent de mesures de protection. Compter les oiseaux d’eau sur une base annuelle et depuis plusieurs dizaines d’années, c’est aussi la possibilité d’avoir un instantané concernant les effectifs et de mieux appréhender les tendances démographiques.
Des oiseaux d’eau sous pression
Les zones humides sont en régression constante dans le monde. Ce sont pourtant des zones extrêmement importantes en termes de biodiversité, de biomasse et de stockage de dioxyde de carbone. Le réchauffement climatique impacte fortement toutes les espèces qui se reproduisent à de très hautes latitudes ; la toundra régresse peu à peu devant la forêt boréale (taïga). Les chutes de neige peuvent être désormais très tardives et brutales, annihilant totalement la reproduction. De plus, les zones de haltes migratoires – notamment les baies et les estuaires – risquent à terme de disparaître devant la montée des océans. Enfin, un grand nombre d’espèces d’oiseaux d’eau sont encore chassées en France, certaines en mauvais état de conservation. La France reste le pays d’Europe où l’on chasse le plus grand nombre d’espèces d’oiseaux et le plus longtemps !
Devant ces facteurs négatifs cumulés, un certain nombre d’espèces ont vu leurs effectifs diminuer de façon importante en France. Notre pays joue pourtant un rôle conséquent pour certaines d’entre elles comme la Bernache cravant – cette petite oie marine dont la métropole peut accueillir l’hiver jusqu’à 70% de la population sibérienne.
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Bilan synthétique et chiffres clés