Le 21 février 2020, Jean-Marie BERNARD offrait en guise de cadeau de départ à l’ex-préfète des Hautes-Alpes, Cécile BIGOT-DEKEYZER, une queue de loup. Cette dernière recevait ledit cadeau gênée, en répondant « j’espère que cette queue de loup a été obtenue dans le cadre légal d’un tir de prélèvement ». Bien au contraire, les analyses faites par l’Office Français de la Biodiversité (OFB) ont invalidé cette hypothèse en montrant que l’ADN prélevée sur la queue de loup ne correspondait à aucun loup déclaré et répertorié dans leur base de données.
Scandalisées par l’irresponsabilité du Président du Conseil départemental, nous avions déposé plainte contre cette infraction et nous étions constituées parties civiles lors de l’audience du 15 février 2021.
Pour rappel, l’article L. 415-3 du Code de l’environnement prohibe « le fait de (…), capturer, détenir, céder, utiliser, transporter, (…) tout ou partie d’animaux ou de végétaux » protégés sans autorisation préalable. N’en déplaise à certains, le loup est une espèce protégée non seulement par la réglementation nationale, mais également par plusieurs conventions internationales que la France a ratifiées.
Ces textes prévoient bien des dispositifs dérogatoires qui permettent de se défendre contre les attaques de loup. Dans le département des Hautes-Alpes, ils sont largement mis en œuvre avec plus de 100 exploitations autorisées à effectuer des tirs de défense simple et 83 des tirs de défense renforcée. Des tirs de prélèvement sont également autorisés dans différentes communes du département.
Une délibération injuste dédouanant le Président du Conseil départemental
Suite aux plaintes de nos associations, le Procureur de la République avait engagé des poursuites et Jean-Marie BERNARD avait été convoqué le 8 décembre 2020 pour une procédure de « comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité ». A cette occasion, il avait refusé la proposition de sanction faite par le Parquet. Une date d’audience correctionnelle avait donc été fixée.
Dans cette perspective, le Conseil départemental votait, le 15 décembre 2020, la protection fonctionnelle de son président. Il était décidé que le Conseil départemental prendrait en charge l’ensemble des frais de justice et potentiels dommages-intérêts à verser aux victimes, pour le compte de Jean-Marie BERNARD.
Qu’un élu, garant de l’intérêt général et de l’application de la loi, se permette de commettre une telle infraction et qu’il puisse bénéficier de la protection fonctionnelle en nous faisant croire qu’il a agi dans le cadre de ses fonctions est on ne peut plus choquant.
Une victoire des associations mais une double peine pour les contribuables Haut-Alpins
Ce vendredi 12 mars 2021, le jugement a été rendu par le Tribunal correctionnel de Gap. Jean-Marie BERNARD a été condamné à 10 000 euros d’amende dont 5 000 euros avec sursis. Pour rappel, le Procureur avait requis 3500€ d’amende et 2 mois d’emprisonnement avec sursis. Les demandes de toutes les parties civiles ont été reçues et les associations obtiendront des dommages-intérêts.
Certes, l’infraction a bien été reconnue et nous nous réjouissons que le Tribunal n’ait pas été dupe de la défense de M. BERNARD qui plaidait à la fois - et de façon contradictoire - l’ignorance et la revendication de l’infraction, comme geste politique. Toutefois, n’oublions pas que l’ensemble des frais de justice et dommages-intérêts seront réglés par le Conseil départemental.
Alors que les scientifiques alertent sur une dégradation de la dynamique des populations de loups[1], cet acte illégal commis par un élu, ne fait que renforcer l’antagonisme entre les professions agricoles et le loup, espèce protégée. Un débat serein est indispensable pour concilier activités économiques et préservation de la biodiversité. C’est ce pour quoi nous œuvrons au quotidien dans nos associations.
[1] Voir note technique de l’OFB et du CNRS https://www.loupfrance.fr/mise-a-jour-des-effectifs-et-parametres-demographiques-de-la-population-de-loups-en-france-consequences-sur-la-viabilite-de-la-population-a-long-terme/